Napoléon: les grands événements militaires: la guérilla espagnole.



Historique.



La « guerrilla » n’est certes pas une invention ou un monopole espagnol. Des soulèvements du peuple s’étaient déjà manifestés bien avant la guerre d’Espagne en différents points de l’Europe. Pour ne pas remonter trop avant dans le temps, rappelons le rôle du peuple lors de la Révolution française, du soulèvement du Tyrol contre Bonaparte, l’insurrection en Vendée ou la rébellion en Calabre, sans oublier que lors de la Guerre des Pyrénées ou Guerre du Roussillon ou Guerre de la Convention (1793-1795), les Espagnols envahissant le Roussillon français rencontrèrent la résistance de petits groupes de paysans armés qui tiraient contre leurs détachements. Ce fut le 3 juillet 1793, que le général Ricardos publia un ban très dur menaçant de pendaison tout civil qui serait surpris les armes à la main.
Un peu plus tard, le général français de Flers proclama le droit à tous citoyens, soldats ou pas, de lutter pour leur patrie.

Ce qui rendit réellement fameux le mouvement « guerrillero » espagnol et qui donna à sa forme de combattre, ce nom de « guerrilla », fut son extension dans le temps et dans l’espace et qui maintint toute sa férocité durant les six années de guerre sur tout le territoire occupé par les Français. Ce harcèlement brisait chez l’ennemi la distinction entre zone de combat et arrière-garde, ne lui laissant, comme seule possession, que le terrain sur lequel il marchait, ne sachant plus quoi faire, se disperser pour arriver à contrôler son arrière-garde ou se concentrer pour terminer, une fois pour toute, avec l’armée régulière espagnole toujours en déroute mais jamais vaincue. Les attaques des convois, la capture du courrier impérial rendaient difficile l’arrivée d’aide tels que renforts, ravitaillement et armement, mais également, rendant impossible le bon fonctionnement de l’administration du roi Joseph en dehors des villes occupées.

On pourrait ou voudrait faire croire que la « guerrilla » espagnole appartenait à une image statique et non à un mouvement en évolution, cependant il s’agissait bien d’un processus en marche ne suivant pas une ligne droite, ni se soumettant à un ordre chronologique. Depuis sa naissance, toujours marquée par les possibilités du moment, la « guerrilla » marche, en colère et en solitaire, vers une maturité coordonnée et réglée qui se terminera, pour une grande majorité de ses groupes, par s’insérer dans les armées régulières espagnoles et par voir leurs chefs atteindre les plus hautes fonctions militaires.


Ref:
LA GUERRA DE LA INDIPENDENCIA
Los Guerilleros
Andrés Cassinello Pérez
(supplément nº 11 - avec DVD)
publié par la revue
LA AVENTURA DE LA HISTORIA
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SPANISH GUERRILLAS IN THE
PENINSULAR WAR 1808 - 1814
René Chartrand et Richard Hook
OSPREY Publishing
Elite 108




Définition.



Plus on avance dans les recherches pour approfondir les raisons qui donnèrent naissance à cette « guerrilla », plus on se trouve confronté à un monde hétérogène des plus complexes ; par exemple la grande diversité concernant la provenance sociale des chefs des groupes de «guerrilla », forment, déjà, rien qu’à elle seule, une insolite mosaïque.
Pour en donner une petite idée, une étude faite il y a déjà quelque temps, signalait que des 300 chefs de groupes « guerrilleros », pris comme exemple, on trouvait 107 ecclésiastiques, 74 militaires, 28 fonctionnaires, des professionnels du droit et de la médecine, 13 nobles, 12 maires de villages, neuf contrebandiers, le reste appartenait à diverses collectivités professionnelles, sans oublier… neuf femmes.
(Bien entendu ces données vont souffrir des modifications importantes au fur et à mesure de l’amplification de la chronologie et du milieu d’où fut faite cette étude).

Les différences entre le nombre des troupes, leur expansion, leur façon d’agir, etc., montrent un panorama bien compliqué. La complexité du phénomène « guerrillero » rend également difficile de trouver une définition qui puisse cerner tous les aspects, tels la grande variété des motifs de l’apparition de chacun des groupes, l’attribution sociale, l’affectation de chacun de leurs membres, l’évolution suivie par les parties, depuis le commencement, les relations avec la classe militaire et la population civile, ainsi que leur rôle sur le terrain, etc.
Cependant, dans toutes les manifestations « guerrilleras », on ne trouvera qu’un élément commun de poids : sa façon de combattre, son comportement irrégulier au-delà des canons militaires établis, ainsi que sa prétention d’autonomie, qui, elle, se réduira petit à petit, au fur et à mesure de la progression du conflit.


Ref :
ESPAÑA, EL INFIERNO DE NAPOLEÓN
1808 – 1814
Une Histoire de la guerre de l’Indépendance
Par Emilio de Diego

La Esfera de los Libros
Avenida de Alfonso XIII, 1, Bajos
28002 Madrid
Année 2008




Classification.



Voici une classification succincte des groupes ayant joué un rôle dans cette lutte contre les Français :

Bandes occasionnelles non régularisées.
Médiocrement structurées, très peu de membres, actions limitées, pas de légitimation. Très peu efficaces contre l’ennemi. Elles tombèrent fréquemment dans la criminalité.

Bandes établies non régularisées.
Dans ce cas il s’agissait d’unités d’une certaine importance mais, au nombre de membres variable suivant les circonstances, qui agirent plus souvent que les bandes occasionnelles. Tout comme les précédents elles inclurent divers groupes de délinquants.

Bandes régularisées.
Celles-ci sont officiellement reconnues et sujettes aux normalités imposées par les autorités civiles ou militaires. Différents sous-groupes s’occupaient de leur succession et du temps de leur activité. Dans beaucoup de cas, leurs chefs finissaient par afficher des grades militaires et parfois, ils pouvaient être assimilés à des milices locales pour des fonctions réalisées.

Corps francs et autres forces de volontaires.
Unités de moyenne ou de grande importance allant d’une centaine jusqu’à plusieurs milliers de membres et agissant sur l’arrière-garde ennemie. Organiquement ils ne faisaient pas partie de l’Armée, bien qu’agissant de façon coordonnée, soumis à son autorité. Ils pouvaient terminer en faisant partie des forces régulières, mais leur forme d’agir s’ajustait avant tout aux tactiques de la « guerrila ».

Groupes de croisade.
Dans leur majorité dirigés, encadrés et formés par des ecclésiastiques, ils agissaient en conformité d’un règlement spécifique. Vers la moitié de 1811 ils avaient pratiquement disparu.

Groupes militaires.
Détachements de troupes régulières en actions de « guerrilla ».

Milices de tous types.
Séries de force de défense locale. Unités traditionnelles recréées. Parfois combattaient comme forces « guerrilleras »

Groupes de Police.
Ils se composaient de fusiliers, de citoyens honorables et de diverses unités destinées à agir comme forces de « l’ordre ». En plus de poursuivre la délinquance, occasionnellement, ils développaient des actions de «guerrilla » mais également de contre « guerrilla ».

Unités militaires d’origine « guerrillera ».
Ici se situent les divisions des chefs les plus connus tels que : Longa, El Empecinado, Villacampa, Mina et autres. Venus comme bandes de "guerrilla", ils finiront par être pratiquement intégrés au sein de l’Armée régulière.


Ref :
ESPAÑA, EL INFIERNO DE NAPOLEÓN
1808 – 1814
Une Histoire de la guerre de l’Indépendance
Par Emilio de Diego

La Esfera de los Libros
Avenida de Alfonso XIII, 1, Bajos
28002 Madrid
Année 2008





Objectifs.



On peut dire que la nature des objectifs qui étaient confiés aux groupes « guerrilleros » consistait en une intervention auxiliaire dans le déroulement des opérations, soumise à l’action de l’Armée régulière. À partir de là, il est possible d’évaluer la portée exacte de l’activité « guerrillera » que l’on pourrait résumer en ces mots :

« Uniquement avec les « guerrilleros » les Espagnols n’auraient pas pu gagner la guerre, mais, sans eux, il aurait été impossible de la gagner. »

Voici donc une liste des contributions apportées par la « guerrilla » :

1. Travaux d’information indispensables pour connaître les mouvements et autres capacités de l’ennemi, sans oublier la divulgation de fausses informations, véritable travail d’intoxication dirigée aux Français. L’importance de ces tâches avait déjà donné leurs fruits à Bailén.

2. Distorsion ou déformation des communications de l’ennemi dont certaines pourraient être qualifiées de sensibles, appréhender les courriers, arrivant, et ainsi, dans les cas extrêmes, paralyser les adversaires.
Rendre difficile ou retarder les transports de tous types pouvant provoquer des situations d’isolement et obliger les Français à assigner un nombre élevé de troupes comme escorte et protection.

3. Intercepter des convois et s’approprier les vivres, munitions, argent, etc.

4. Distraire et détourner d’importants contingents de troupes françaises destinées à poursuivre les groupes « guerrileros ».

5. Attaques par surprise de colonnes et de places ennemies.

6. Destruction des biens nécessaires à la survie de l’armée ennemie.

7. Pendant les dernières années de la guerre, notable contribution aux contingents de l’armée alliée, par exemple, Arapiles, Vitoria, San Marcial…

8. Étendre la terreur et l’insécurité permanente dans les files françaises en les soumettant à une énorme usure psychologique. Les soldats napoléoniens se sentaient uniquement maîtres du terrain qu’ils piétinaient.

9. Effrayer les collaborateurs et tous ceux qui pourraient le devenir, contribuer à l’isolement non seulement de l’Armée française, mais également à celui du régiment « josefino » du roi Joseph.

10. Provoquer de continuels désordres qui endommageaient l’image de la monarchie bonapartiste et contredisaient ses prétentions d’ordre et d’efficacité, produisant et transmettant ainsi une constante sensation de faiblesse.

11. Aider, dans certains cas, à la récupération de soldats dispersés et de déserteurs, collaborer au recrutement de troupes régulières et les approvisionner.


Ref :
ESPAÑA, EL INFIERNO DE NAPOLEÓN
1808 – 1814
Une Histoire de la guerre de l’Indépendance
Par Emilio de Diego

La Esfera de los Libros
Avenida de Alfonso XIII, 1, Bajos
28002 Madrid
Année 2008








© Diana.





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