Le 1er septembre, il lui avait déjà écrit :J'attache une grande importance et une grande idée de gloire à détruire la mendicité. Faites en sorte qu'au 15 décembre vous soyez prêt sur toutes les questions afin que je puisse par un décret général porter le dernier coup à la mendicité.
Un décret du 5 juillet 1808 décide la création de dépôts de mendicité. Il en existait déjà 28 au début du Consulat, mais le décret de 1808 prévoyait d'en ouvrir un dans chaque département. En 1813, un document du ministre de l'Intérieur répertorie 52 dépôts en activité, 31 en construction et 42 en projet. Cependant, à partir de 1811, tous les projets s'arrêtent à cause de la crise économique qui provoque une saturation des dépôts comme à Villers-Cotterêts qui aurait dû accueillir un millier de mendiants mais qui faute d'aménagements nécessaires est rapidement surchargé. Le trop-plein doit être transféré à Paris vers Bicêtre et la Salpêtrière.Les choses devraient être établies de manière qu'on pût dire : tout mendiant sera arrêté. Mais l'arrêter pour le mettre en prison serait barbare ou absurde. Il ne faut l'arrêter que pour lui apprendre à gagner sa vie par son travail. Il faut donc une ou plusieurs maisons ou ateliers de charité.
En mars 1811, le président du conseil municipal de Lille écrit :
En effet, malgré la lucidité de Napoléon sur l'inadéquation de la prison pour régler le problème de la mendicité, le Code pénal de 1810 opte pour une répression sévère du vagabondage et de la mendicité en infligeant des peines d'emprisonnement :Dans ce moment, les places publiques et toutes les rues sont couvertes d'ouvriers réduits à mendier. Déjà la faim a poussé quelques-uns de ces malheureux aux extrémités les plus pénibles et on en a vu se donner la mort dans la crainte de subir une condamnation infamante.
Comme les tentatives précédentes pour éteindre la mendicité et le vagabondage, les décisions de Napoléon se soldent par un échec : mendicité et errance perdurent.§ II. – VAGABONDAGE.
ARTICLE 269.
Le vagabondage est un délit.
ARTICLE 270.
Les vagabonds ou gens sans aveu sont ceux qui n'ont ni domicile certain, ni moyen de subsistance, et qui n'exercent habituellement ni métier ni profession.
ARTICLE 271.
Les vagabonds ou gens sans aveu qui auront été légalement déclarés tels, seront, pour ce seul fait, punis de trois à six mois d'emprisonnement, et demeureront, après avoir subi leur peine, à la disposition du gouvernement pendant le temps qu'il déterminera, eu égard à leur conduite.
ARTICLE 272.
Les individus déclarés vagabonds par jugement, pourront, s'ils sont étrangers, être conduits, par les ordres du gouvernement, hors du territoire de l'Empire.
ARTICLE 273.
Les vagabonds nés en France pourront, après un jugement même passé en force de chose jugée, être réclamés par délibération du conseil municipal de la commune où ils sont nés, ou cautionnés par un citoyen solvable.
Si le gouvernement accueille la réclamation ou agrée la caution, les individus ainsi réclamés ou cautionnés seront, par ses ordres, renvoyés ou conduits dans la commune qui les a réclamés, ou dans celle qui leur sera assignée pour résidence, sur la demande de la caution.
PARAGRAPHE III. - MENDICITÉ.
ARTICLE 274.
Toute personne qui aura été trouvée mendiant dans un lieu pour lequel il existera un établissement public organisé afin d'obvier à la mendicité, sera punie de trois à six mois d'emprisonnement, et sera, après l'expiration de sa peine, conduite au dépôt de mendicité.
ARTICLE 275.
Dans les lieux où il n'existe point encore de tels établissements, les mendiants d'habitude valides seront punis d'un mois à trois mois d'emprisonnement.
S'ils ont été arrêtés hors du canton de leur résidence, ils seront punis d'un emprisonnement de six mois à deux ans.
ARTICLE 276.
Tous mendiants, même invalides, qui auront usé de menaces, ou seront entrés sans permission du propriétaire ou des personnes de sa maison, soit dans une habitation, soit dans un enclos en dépendant,
Ou qui feindront des plaies ou infirmités,
Ou qui mendieront en réunion, à moins que ce ne soient le mari et la femme, le père ou la mère et leurs jeunes enfants, l'aveugle et son conducteur,
Seront punis d'un emprisonnement de six mois à deux ans.
Dispositions communes aux Vagabonds et Mendiants.
ARTICLE 277.
Tout mendiant ou vagabond qui aura été saisi travesti d'une manière quelconque,
Ou porteur d'armes, bien qu'il n'en ait usé ni menacé,
Ou muni de limes, crochets ou autres instruments propres soit à commettre des vols ou d'autres délits, soit à lui procurer les moyens de pénétrer dans les maisons,
Sera puni de deux à cinq ans d'emprisonnement.
ARTICLE 278.
Tout mendiant ou vagabond qui sera trouvé porteur d'un ou de plusieurs effets d'une valeur supérieure à cent francs, et qui ne justifiera point d'où ils lui proviennent, sera puni de la peine portée en l'article 276.
ARTICLE 279.
Tout mendiant ou vagabond qui aura exercé quelque acte de violence que ce soit envers les personnes, sera puni de la réclusion, sans préjudice de peines plus fortes, s'il y a lieu, à raison du genre et des circonstances de la violence.
ARTICLE 280.
Tout vagabond ou mendiant qui aura commis un crime emportant la peine des travaux forcés à temps, sera en outre marqué.
ARTICLE 281.
Les peines établies par le présent Code contre les individus porteurs de faux certificats, faux passe-ports ou fausses feuilles de route, seront toujours, dans leur espèce, portées au maximum quand elles seront appliquées à des vagabonds ou mendiants.
ARTICLE 282.
Les vagabonds ou mendiants qui auront subi les peines portées par les articles précédents, demeureront, à la fin de ces peines, à la disposition du gouvernement.
Source principale : José CUBERO, Histoire du vagabondage du Moyen Age à nos jours, Paris, Imago, 1998.