Les acteurs: Las Cases.


Las Cases - 1766-1842



Le comte Marie-Joseph-Emmanuel-Auguste-Dieudonné de Las Cases est né le 21 juin 1766 sur la commune de Blan, lieu-dit Las Cases, situé entre Castres et Revel dans le Tarn. Son père est François-Hyacinthe, marquis de Las Cases, commandant de Revel et Sorèze et sa mère Jeanne de Naves de Ranchin.
Le nom de Las Cases apparaît dans l’histoire de l’Espagne, puisqu’un Las Cases fait partie de l’entourage de Christophe Colomb. Il en est de même pour la France puisque nous trouvons des Las Cases dans les armées de Louis XII et François 1er.

Il étudie au collège de Sovèze, puis à Paris en 1777, au collège de Vendôme. Dans la capitale, il réside chez sa tante, Madame de Berny. En 1780, il est admis à l’Ecole militaire de Paris, comme cadet gentilhomme. Il est de petite taille et frêle.
« Les classes se déplaçaient en rang de taille. Ma place n’était pas difficile à trouver, j’étais le dernier. »
Après avoir choisi la Marine en 1782, il suit les cours de l’Ecole d’application navale de Brest, où il se spécialise dans les techniques de la cartographie.

La France soutenant la guerre d’indépendance des Etats-Unis contre l’Angleterre, la marine française se battait en divers lieux. Les Cases, aspirant de marine, à bord de l’Actif faisant partie de la flotte de la Motte-Picquet, participe au blocus de Gibraltar et à divers combats contre les navires anglais.

Après cette guerre, il embarque à Brest sur le Téméraire à destination de Saint-Domingue. Puis il séjourne à la Martinique où, reçu chez les Tascher, il fait la connaissance de la future impératrice, alors vicomtesse de Beauharnais qui, venant d’être abandonnée par son mari, était revenue dans son île natale.

A l’été 1788, de retour en France il débarque à Brest. Il est nommé lieutenant de vaisseau en 1789.

Lorsque survient la Révolution, il choisit en 1790 d’émigrer et de rejoindre l’armée de Condé à Coblence. Il y est déçu par l’accueil qui lui est fait et par les querelles entre émigrés. Après la dissolution de cette armée, suite à la bataille de Valmy du 20 septembre 1792, Las Cases se rend en Angleterre, participe à la préparation de l’expédition de Quiberon, débarque à l’île d’Yeu.
Après l’échec de cette expédition, il peut réembarquer et revenir en Angleterre.

A Londres, il travaille à la rédaction d’un atlas géographique et donne des leçons. C’est à cette occasion qu’il noue une fidèle amitié avec l’épouse du riche baronet Thomes Clavering « une jolie lady française ».

Il rentre en France clandestinement pour épouser son amie d’enfance devenue orpheline, Henriette de Kergariou de Coëtilliou.
Puis il rentre à Londres en laissant son épouse, enceinte en Bretagne.
Il remporte un grand succès en Angleterre en 1802, après la publication, sous le pseudonyme de A. Lesage, d’un Atlas historique, généalogique, chronologique et géographique. Cet ouvrage connaîtra le même succès en France, puisque à partir de 1803, une édition paraîtra chaque année.

Le Premier Consul décide l’amnistie, en 1802, des émigrés. Les Cases rentre en France. Nous le retrouvons dans les salons parisiens, notamment ceux de Joséphine, Decrès, Clarke et Cambacérès.

Après la victoire d’Austerlitz, Las Cases admire Napoléon et se rallie au régime. Admis à la cour impériale grâce à Joséphine, il est baron de l’Empire le 28 janvier 1809 et comte de l’Empire le 16 décembre 1809.
Le 2 septembre 1809, il demande à servir dans l’armée et il occupe la fonction de capitaine adjoint provisoire à l’état-major du général d’Hartrel, chef d’état-major de Bernadotte, prince de Ponte Corvo, à Anvers.

Il est nommé chambellan de l’Empereur le 21 décembre 1809. Maître des requêtes au Conseil d’Etat le 27 juin 1810, il est envoyé en mission en Hollande (10 juillet au 13 novembre 1810), puis en Illyrie (d’avril 1811 à août 1812).

En 1812, il effectue une mission d’inspection des dépôts de mendicité et des prisons qui lui fera proposer d’utiles réformes à Napoléon.

Au printemps 1814, il participe à la défense de Paris comme chef de bataillon à la 10e légion, sous Moncey. Après l’abdication de Napoléon, il refuse de siéger au Conseil d’Etat et rejoint Londres.

Au retour de l’Aigle, Las Cases est aux Tuileries dès le 21 mars 1815 :
« La porte s’ouvre, je vois l’objet de nos espérances, mon coeur tressaille, les larmes coulent ; je crois tous nos malheurs effacés, notre gloire revenue. »
Dès le 24 mars 1815, il retrouve ses fonctions de chambellan et de conseiller d’Etat.
Après Waterloo, il reste au service de l’Empereur et sollicite l’honneur de partager son exil :
« Savez-vous où cela peut vous conduire? » demande Napoléon étonné.
« Je ne l’ai point calculé », répond Las Cases.
L’Empereur accepte, Las Cases comprend le rôle qu’il peut tenir dans l’ombre du grand homme.

Le 29 juin 1815, Napoléon prend la route de Rochefort en compagnie des généraux Becker, Bertrand et Savary, via Rambouillet, Tours et Niort. Las Cases, son fil Emmanuel, Montholon, Planat et Résigny se rendent également à Rochefort, mais par Orléans, Limoges et Jarnac.

Ses connaissances de la langue anglaise le font désigner par l’Empereur, le 10 juillet 1815, pour négocier auprès du capitaine Maitland, commandant du Bellerophon. Las Cases se rend auprès de Napoléon :
« Pourquoi, Monsieur, ne mettez-vous aucune de vos décorations ?
- Mais, Sire, parce que je n’en ai point.
- N’avez-vous pas au moins la Légion d’honneur ?
- Non Sire.
- Comment est-ce possible ? Allez demander à Marchand une des miennes.
»

Le 14 juillet, il retourne à bord du Bellerophon avec le général Lallemand. Le 15 juillet, à l’aube, Napoléon, en uniforme vert de colonel des chasseurs à cheval de la Garde Impériale, monte à bord et déclare à Maitland :
« Je viens me mettre sous la protection des lois d’Angleterre. »
Le Bellérophon appareille et vogue vers l’Angleterre ; il arrive à Plymouth le 26 juillet. Le 7 août, Napoléon et sa suite montent à bord du Northumberland.

Au cours de la traversée à destination de Sainte-Hélène, Las Cases note déjà les premiers souvenirs de Napoléon, qui sont remis en ordre en fin de journée par son fils Emmanuel.
Napoléon commence ses dictées le 9 septembre 1815, en mer. Ces dictées seront à l’origine du Mémorial de Sainte-Hélène.
Las Cases sait se faire apprécier de l’exilé par ses manières affables, son érudition et sa disponibilité.

Un jour Napoléon lui offrit un superbe nécessaire de voyage en lui disant : « Il y a bien longtemps que je l’ai ; je m’en suis servi le matin de la bataille d’Austerlitz.
Il passera au petit Emmanuel. Il le fera voir et dira :
C’est l’Empereur Napoléon qui l’a donné à mon père, à Sainte-Hélène ».

Les autres membres de la Maison de l’Empereur en exil jalousent l’intimité dont jouit Las Cases auprès de Napoléon.

Les dictées continuent jusqu’en novembre 1816. C’est à cette époque qu’il confie au serviteur James Scott une lettre clandestine pour Lady Clavering, dans laquelle il dénonce les conditions de détention de l’Empereur. Malheureusement, le serviteur en informe Hudson Lowe et le 21 novembre 1816 Las Cases et son fils sont arrêtés.
Le 11 décembre 1816, Napoléon lui adresse une lettre :
"Votre conduite à Sainte-Hélène a été, comme votre vie, honorable et sans reproche, j’aime à vous le dire... Votre société m’était nécessaire ; seul, vous lisez, vous parlez et entendez l’anglais. Combien vous avez passé de nuits pendant mes maladies ! Cependant, je vous engage et, au besoin, je vous ordonne de requérir le commandant de ce pays de vous renvoyer sur le continent... Arrivé en Europe, soit que vous alliez en Angleterre, soit que vous retourniez dans la patrie, oubliez le souvenir des maux qui vous ont fait souffrir ; vantez-vous de la fidélité que vous m’avez montrée et de toute l’affection que je vous porte. »

Las Cases et son fils sont expulsés et quittent l’île de Sainte-Hélène le 30 décembre 1816 sur le Griffon pour le Cap, où ils restent en quarantaine, avant de regagner l’Europe. Refoulés d’Angleterre en novembre 1817, ils sont conduits à Ostende.
La France, les Pays-Bas et l’Autriche refusent de leur donner l’asile. Las Cases et sa famille s’installent en décembre 1817 à Francfort, puis au pays de Bade au début 1818.

Il collecte auprès des Bonaparte des fonds destinés à Napoléon. Il est à Anvers lorsque, le 10 juillet 1821, il apprend la mort de Napoléon, survenue à Sainte-Hélène, le 5 mai 1821. Son nom a été mentionné quatre fois dans le testament de l’Empereur.

L’autorisation de rentrer en France est accordée à Las Cases dans les derniers jours de juillet 1821 et il arrive à Paris le 15 août.
En 1822, il récupère ses manuscrits et les huit volumes du Mémorial de Sainte-Hélène ou journal où se trouve consigné jour par jour tout ce qu’a dit et fait Napoléon durant dix-huit mois, du 20 juin 1815 au 25 novembre 1816, sont publiés à partir de 1823. C’est un énorme succès. Les éditions de 1824, 1830, 1835, 1840 et 1841-1842 rapportent plus de 3 millions de francs à Las Cases.
La légende napoléonienne doit beaucoup à cet ouvrage.

En 1831, Las Cases est élu député de l’arrondissement de Saint-Denis et siège à l’extrême gauche de la Chambre des députés. Il est réélu en 1839.

Aveugle, il ne peut accompagner le prince de Joinville à Sainte-Hélène pour le Retour des Cendres de Napoléon. Le 15 décembre 1840, il est présent aux Invalides, lors de la cérémonie.

Las Cases meurt le 14 mai 1842 à Passy.



Source :

Revue du Souvenir Napoléonien numéro 442.


© La Bédoyère.






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